Un film français de 1969-70 qui à l'époque n'a pas eu de succès, de Marc Scialom. Aujourd'hui, il ressort et fait sensation: il raconte la perte d'identité qui s'opère chez les émigrants du Maghreb, lorsqu'ils arrivent à Marseille, et notamment le racisme, la peur, le mépris? des Français. J'ai lu dans une critique que ce film dépeint une situation qui pourrait être filmée dans les villes françaises aujourd'hui encore. C'est très vrai. Bien qu'en mauvais état, le film est à prendre par bribes, se comprend par bribes. On obtient une image de la société française de l'époque un peu comme Picasso peignait ses scènes, le reste du travail est fait par notre cerveau. Ce film est clairement impossible à digérer si on le mange cru. C'est un film qui doit mijoter longtemps dans le cerveau pour que son jus ressorte avec encore plus de goût! Et avec ce temps de mijotage, on se pose ce genre de questions: la perte d'identité, son émiettement semble être une raison de la non-intégration des gens, parallèlement au mépris de la population locale. Y aurait-il eu meilleure intégration, dans le cas de la France, si le Gouvernement à l'époque avait, par le moyen des écoles, rendu possible l'appropriation de ses origines?
Le régisseur a partiellement répondu à ma question: les enfants des enfants d'immigrés ne parlent ni la langue de leur origine - l'arabe - et ne maîtrise finalement pas le français, à cause de ce rejet persistant de la culture du "pays d'accueil" - bien que dans le cas français, il s'agit en fait du pays de naissance et non d'un pays d'accueil, mais ce n'est pas ressenti ainsi par ces enfants d'immigrés. Un signe de très mauvaise réponse du Gouvernement à cette intégration: le système éducatif propose comme langues l'allemand, l'anglais et l'espagnol en langues obligatoires. Pourquoi l'arabe n'est-il pas proposé? Il n'y a aucun cour d'approfondissement de la culture arabe, même pas une option facultative!
Il est clair que l'éducation nationale doit favoriser la connaissance de la culture nationale. Cela ne signifie pas faire l'impasse sur les autres cultures. Apprendre les règles de grammaire de l'arabe, maîtriser la langue de la maison et en comprendre sa structure, est sûrement un atout pour ensuite apprendre le français et accepter sa grammaire aussi.
On ne peut conclure de manière optimiste sur ce sujet. Ce questionnement sur l'intégration et plus que l'intégration, l'assimilation, aurait dû avoir lieu au plus tard il y a 30 ans. Maintenant, il est trop tard, et vous remarquerez qu'un tel débat n'existe toujours pas, ou alors se construit sur de fausses bases: s'intégrer veut dire "faire soi les valeurs du pays d'accueil", ce qui est pour moi un non-sens au simple coup d'oeil.
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