Saturday, February 11, 2006

Il s'en est passé des choses ces derniers jours dans l'actualité. Je pense ici aux caricatures de Mahomet qui ont fait scandale. Ce que j'ai vu, ce sont des milliers de gens, selon les "nouilles", défiler en Orient, brûler les drapeaux danois ou suisses, lorsqu'ils le confondent avec le danois, détruire des ambassades, bref, une montée de violence qui paraît inexpliquée. Ensuite j'ai éteint la télé, je me suis déconnecté du monde car j'étais énervé de voir ces réactions, d'avoir à me dire que le monde réagit ainsi. C'est un sentiment qui peut faire peur - sorte de solitude, de volonté d'éviter la fatalité.
Ensuite nous en avons parlé longtemps en cours, nous avons lu des articles de la FAZ, j'ai vu le débat médiatique qui s'est soulevé autour de ce thème: la liberté de la presse... quelles limites ? Des abus ? Les journaux à grand tirage se sont unis dans leur lutte pour la liberté de la presse à tout prix, l'arrogance vis-à-vis des religions, tandis que le peuple désorienté d'Orient crie à la mort des journalistes danois, que certains gouvernements orientés et orientaux déguisent l'information pour soulever le peuple contre l'Occident oxydé. Lequel est l'oxydant ou l'occidé ? C'est à en perdre le Nord.
Enfin il y a le besoin de valeurs sûres, le retour vers le passé pour trouver la réponse. J'ai trouvé une aide dans mes souvenirs de lecture de Stefan Zweig, dans le livre "Le Monde d'Hier", roman autobiographique. Je me suis dit que la question que posent les médias, la question que se pose le monde, n'est pas la bonne. Il ne s'agit pas ici de liberté de la presse.
J'ai aussi été surpris et ai dû prendre un air ahuri en apprenant que CNN masque les diffusions des caricatures à l'écran afin de ne pas choquer les américains musulmans... quid des images de morts en Irak sortis de leurs voitures calcinées et traînés par la foule en transe, en furie ? Ces images ne sont-elles pas bien plus atroces ?
Zweig raconte merveilleusement comment l'opinion internationale a accepté, petit à petit, les crimes contre l'humanité perpétrés par l'Etat nazi à partir de 1934. Alors qu'à l'aube du 20ème siècle, tuer un homme était un crime immonde, en 1938 il était "normal" d'emprisonner et de tuer les opposants au régime, "normal" d'occuper les pays et de ne pas respecter les traités. Cette normalité est pernicieuse, n'est pas maîtrisable. C'est la conscience collective de l'humanité, qui n'a pas de maître car chacun de nous en est. Aujourd'hui je me demande, j'ai peur, que la normalité évolue vers une nouvelle acceptation de la violence. Je me demande s'il n'est pas déjà trop tard. N'est-il finalement pas normal qu'il y ait chaque jour un attentat en Irak ou au Proche-Orient ?
Si cette crise mondiale montre tout de même la place que prennent les médias de nos jours, ils en restent à mon avis simplement le déclencheur. En effet la construction des ennuis actuels remonte au moins à la Guerre Froide, lorsque l'URSS et les USA and co supportaient par l'envoi d'armes les conflits en Orient.
On voit bien que la liberté de la presse n'est pas la question. La question, tournée vers le futur, est plutôt: comment rétablir les ponts entre la culture occidentale et la culture orientale ? Il me déplaît presque de formuler ainsi cette question, car je suis de l'avis qu'il n'y a jamais eu deux ou plusieurs cultures distinctes, mais bien des cultures entremêlées, dégradées différemment suivant l'influence des religions et des peuples. Les médias ont tendance à montrer un conflit entre la culture occidentale, européenne, et la culture orientale. Cette image se répand car son côté manichéen est aguicheur. On oublie alors comment les deux se sont inspirées mutuellement, comment leur mélange a permis de créer Venise, cette ville d'Occident aux palais à l'architecture mauresque, aux rues teintées d'Orient !
Zweig le regrette. La prépondérance des médias empêche l'individu de vivre confiné dans son monde, sans se préoccuper du reste. Aujourd'hui plus que jamais par le passé, le mouvement du petit doigt d'un imam iranais comme l'élection du président américain ont de l'importance pour chacun de nous. Et finalement Hier, en 1900, la vie était plus douce...




1 comment:

My said...

C'est assez bizarre comme traverser la Manche coupe du monde. En effet sans tele et sans Internet nous n'avions pas eu vent des caricatures. Et pourtant nous cotoyons des etudiants de toute l'Europe: Grece, Danemark, Finlande, Allemagne, Pologne. Coupes des medias, nous avons trouve la situation plutot bizarre en voyant la une d'un journal avec des islamistes faisant flamber des drapeaux. Je me suis alors demander quel crime avait ete commis. J'ai imagine quelque chose de grave. Et lorsqu'on m'a appris la cause de cet embrasement, j'ai trouve tout ceci terriblement puerile.