Sunday, November 07, 2010

De l’utilité de la politique dans la société

Métro ligne 6 entre Bercy et Quai de la Gare. On traverse la Seine. D’un côté, il y a le ministère de l’Economie et des Finances, construction démesurée ressemblant à un dock géant. De l’autre côté, une brasserie fait l’angle. On aperçoit aussi une boulangerie. Dans un processus de questionnement naturel, la question suivante vient à l’esprit : s’il n’y avait pas le ministère de l’économie et des finances, en quelques sortes si le gouvernement perdait toute autorité sur l’économie, les restaurants et boulangeries continueraient-ils à tourner normalement ?
Des réponses partisanes seraient un « oui » ou un « non » catégorique. On peut sûrement trouver de nombreux arguments hautement économiques et politiques. Toutefois, la réponse importe peu à mon avis. Ce qui est grave, c’est d’en venir à de telles considérations.


La solidarité dans la société

En France, de nombreux principes de solidarité et autres améliorations sociales sont censés assurer l'égalité entre les citoyens. Fondamentalement, c'est une bonne idée. En pratique, on se rend compte que bon nombre de personnes parfois plus pragmatiques que mal intentionnées contournent ces avancées sociales. Exemple le plus récent en date pour moi: l'immobilier locatif parisien. Lors de la visite d'appartement à Paris, il est demandé tout un tas de justificatifs, dont certains peuvent se retourner contre le demandeur. Le contrat de travail est demandé. Si vous êtes en CDD, contrat à durée déterminée, vos chances d'obtenir l'appartement s'amenuisent. Si vous êtes en CDI, contrat à durée indéterminée, que votre contrat dispose d'une période d'essai en cours au moment de votre recherche, certains agents immobiliers y verront un risque énorme et vos chances d'obtenir l'appartement se réduiront d'autant. Mais alors, à quoi bon avoir des CDD et des périodes d'essai si cela devient une entrave au logement, droit a priori le plus universel et commun ? Pourquoi cela constitue-t-il un risque ?
Pourquoi ? C'est facile. La procédure d'expulsion de locataires peut durer deux ans, entre la poursuite pour non paiement au tribunal d'instance et la procédure d'expulsion, soumise à certaines conditions prévues par la loi n°89-462 du 6 juillet 1989. Résultat: tout profil différent du CDI cadre depuis deux ans dans un grand groupe américain aura du mal à se loger - du moins dans Paris. Aucun texte de loi ne l'écrit. Est-ce placer les gens à égalité de chances ? Je reste songeur sur la devise de notre République.


La vie de François le Français

Le quotidien du Français moyen n'a rien à voir avec celui des magazines. Il est dans la rue en confrontation avec les emmerdes. C'est un peu cru de le dire ainsi, mais c'est si vrai. Dans la rue, il voit ou pressent la violence, la délinquance des jeunes et "plus jeunes", la mendicité oppressive et la misère, les grèves, le mécontentement syndical, le vandalisme, l'insécurité publique, l'insuffisance du pouvoir d'achat, l'opulence des hommes politiques, les dîners cocktails des quelques bien-nés de ce monde. Ressort-on le vieil esprit vindicatif de la roture pré-1789 ?  A peine ! Aujourd'hui la plupart des Français se laisse assommer par l'information apaisante des journaux. Les quelques troublions peuvent moisir dans leur trou. Le géant TF1 et ses émissions anesthésiantes est là pour occuper la scène médiatique. Pas de révolution. Pas de soulèvement de la Nation avec son grand N. La place de la Nation est grande, je suis tout petit.


Casseurs des villes et banlieues cassées

Au-delà de la non-révolution, on stigmatise les casseurs. Certes, ces jeunes, dont certains ont encore des dents de lait, détruisent, vandalisent sans discernement, dans une rage intense et incontrôlable. S'est-on seulement demandé pourquoi ? L'état des immeubles dans certaines banlieues parle de lui-même. La vie en périphérie des villes est morne et sans intérêt. Laisser des jeunes dans de tels lieux sans occupation n'a aucun sens. Après plus de trente années d'immobilisme, pas étonnant que ça finisse par exploser. L'ascenseur social est en panne, on ne parle plus que des <0,0001 pour cent de la population mondiale gagnant plus de 100 millions de dollars par mois parce qu'ils savent jouer avec les cordes financières de notre système. Le moment n'est-il pas venu de valoriser le réel... le culturel ? Les plus grands casseurs dans les villes ne sont-ils pas ceux qui tuent la vie d'un quartier populaire pour y implanter des boutiques de luxe (cf. cas du quartier Grolée à Lyon) ? De quoi se nourrissent les habitants d'une ville ? De sacs Louis Vuitton achetés par cinq stars américaines ?


Quand tout quitte la logique humaine, il est bon de rappeler les bases de la vie en société. Lorsque la politique et le politique semblent oublier cette base, quelle place doit-on leur accorder pour définir les choix de vie de toute une société ? Me vient curieusement à l'esprit l'image du bac à sable où s'amusent les enfants sous le regard attendri de leur parents...

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